Donations mobilières devant un Notaire étranger : Clap de fin le 15 décembre 2020 ?
Le tarif des droits de succession applicable en Belgique, qui varie en fonction de la Région dans laquelle le défunt était domicilié au cours des 5 années précédant son décès, peut être très élevé. Il peut atteindre 30% lorsque la succession est dévolue à des héritiers en ligne directe, à un conjoint ou à un cohabitant légal et s’envoler jusqu’à 80% dans les autres hypothèses.
Par chance, le futur défunt n’est pas démuni face à cette situation et il peut tenter de réduire la charge successorale qui incombera à ses héritiers, notamment en recourant à des donations
Si les donations d’immeubles situés en Belgique doivent obligatoirement être enregistrées en Belgique, de sorte qu’elles donnent lieu au paiement de droits de donation, il n’en va pas de même des donations mobilières. En effet, en ce qui concerne les donations mobilières, plusieurs hypothèses sont envisageables :
- Soit la donation mobilière est réalisée devant un Notaire belge. Elle est alors obligatoirement enregistrable et des droits de donation sont dus, au taux de 3,3% ou 5,5% en Région wallonne et de 3% ou 7% en Région bruxelloise et en Région flamande.
- Soit la donation mobilière est réalisée sans l’intervention d’un Notaire belge et aucun droit de donation n’est dû si les parties ne présentent pas volontairement l’acte de donation à l’enregistrement. A défaut d’enregistrement de la donation, le donataire est toutefois redevable de droits de succession sur les avoirs reçus par donation si le donateur décède dans les 3 ans qui suivent la donation
Dans l’état actuel de la législation, les donations mobilières réalisées devant un Notaire étranger ne doivent pas être enregistrées de sorte qu’elles ne donnent pas lieu au paiement de droits de donation.
Certaines donations mobilières, notamment les donations avec réserve d’usufruit, les donations de titres nominatifs ou encore les donations préalables à un achat scindé, nécessitent le recours à un Notaire. De nombreux belges recourent dès lors aux services de Notaires établis à l’étranger, ce qui permet d’obtenir la sécurité apportée par l’acte notarié à moindre coût fiscal.
En date du 17 juin 2020, une proposition de loi a été déposée à la Chambre des représentants afin de rendre obligatoire l’enregistrement des donations mobilières réalisées devant un Notaire étranger et, par conséquent, de rendre obligatoire le paiement des droits de donation corrélatif. L’objectif était que la nouvelle législation entre en vigueur le 1er décembre 2020.
Le 14 septembre 2020, le Conseil d’Etat a recallé la proposition de loi initiale au motif que les modifications envisagées ont trait à la matière imposable d’impôts régionaux. Dans ces circonstances, les modifications doivent être introduites par une loi spéciale qui ne peut être adoptée qu’à majorité spéciale. On pouvait par conséquent sérieusement douter de voir aboutir le projet législatif avant la fin de l’année 2020.
Elevant la question de l’enregistrement obligatoire des donations mobilières réalisées devant des Notaires étrangers au sommet de ses priorités, le législateur a toutefois mis les bouchées doubles et une proposition de loi spéciale a été déposée à la Chambre des représentants le 10 novembre 2020.
Cette proposition de loi, qui prévoit de soumettre à l’enregistrement obligatoire « les actes notariés passés en pays étranger qui font titre d’une donation entre vifs de biens meubles par un habitant du royaume » a été adoptée le 26 novembre 2020 par la Chambre des représentants. La proposition de loi doit désormais passer le cap du Sénat, où elle sera analysée et votée lors de la séance plénière du 11 décembre 2020.
Si la proposition de loi spéciale est définitivement adoptée, les donations mobilières réalisées devant un Notaire étranger à compter du 15 décembre 2020 devront être enregistrées en Belgique et elles donneront lieu au paiement de droits de donation, à l’identique des donations qui seraient réalisées devant un Notaire belge.
Rien n’empêchera toutefois, dans les hypothèses où l’intervention d’un Notaire n’est pas obligatoire, de recourir à des donations manuelles non enregistrables. En outre, le coût fiscal de l’enregistrement d’une donation mobilière (maximum 5,5% en Région wallonne et 7% en Région bruxelloise et en Région flamande) doit être relativisé par rapport à la sécurité qu’un tel enregistrement apporte en réduisant notamment à néant le risque de rattrapage en matière de droits de succession si le donateur décède dans les 3 ans de la donation.
C. BELLINASO